Nature
Y-a-t’il un seul être humain sur cette planète qui n’aime pas la Nature ?
Je conçois que certaines personnes aient peur de la Nature, car elle peut révéler chez elles leur angoisse de l’inconnu, de l’étrange, de l’insécurité voire un danger de maladie ou de mort. Vers quoi allons-nous pour nous ressourcer, nous reposer l’esprit ou le cœur : un hamburger, une série télévisée ? Non, c’est l’espace naturel qui nous attire, nous appelle et nous nettoie. La montagne, la mer, la forêt, les plaines à perte de vue, les sommets enneigés, les vallées verdoyantes, le ciel pur, un lac, une rivière, les étoiles aussi nous parlent. Mais pourquoi sommes-nous autant sourds alors que notre planète se lamente de nos actes insensés envers elle ? Nous, toutes petites choses qui nous croyons séparés de ce dont nous sommes pourtant composés, c’est-à-dire de l’eau, des minéraux, de la chaleur, du carbone, de l’oxygène, de l’hydrogène nous pillons, dévastons, prostituons la nature. Nous sommes de la Nature sur pattes, pourquoi nous tuons-nous nous mêmes alors ?
La Nature, de par son mouvement créatif permanent, nous a doté de ce qu’on appelle le mental. Une forme d’énergie qui permet de penser, de conceptualiser et donc de créer des idées, ces "choses" sans aucune consistance mais qui nous font agir. Je constate tous les jours que nous savons assez mal nous servir de ce mental, surtout lorsqu’il est associé à certaines de nos composantes corporelles et qu’il provoque ainsi ce que nous appelons des émotions. Avons-nous appris à gérer ces dernières de manière efficace ? Heureusement, depuis quelques décennies des courants de pensée bienveillante se sont plus ou moins démocratisées et nous offrent des conseils de comportement et des techniques visant à mieux gérer nos émotions, états d’esprit et pensées névrosantes. J’ajoute au passage que certaines traditions orientales connaissent cela depuis plusieurs millénaires.
Pour autant nous continuons à gaspiller la nature par nos consommations excessives (que ce soit de matériaux, liquides ou animaux) et en produisant des déchets polluants que nous retrouvons dans l’eau que nous buvons, les aliments que nous mangeons et l’air que nous respirons.
Il paraît que nous sommes intelligents, voici une définition commune :
"L'intelligence désigne communément le potentiel des capacités mentales et cognitives d'un individu, animal ou humain, lui permettant de résoudre un problème ou de s'adapter à son environnement".
D’après celle définition - si je l’extrapole un peu, quid du côté instinctif - j’oserais penser que les bactéries, les virus, les insectes, les plantes et les animaux doivent être très intelligents car ils ont su, pendant des millions d’années s’adapter, croître et évoluer dans des milieux souvent très hostiles. Alors que nous, en seulement quelques millénaires nous nous sommes débrouillés pour scier la branche sur laquelle nous sommes assis. Nous pourrions ici envisager que l’intelligence ne se borne pas à une capacité mentale. Fait paradoxal, nous sommes capables de faire preuve d’une incroyable ingéniosité dans nombre de domaines pour améliorer notre bien-être, et en même temps nous pouvons être d’une intelligence titanesque quand il s’agit de causer du tort.
En voici juste quelques exemples :
- nous sommes capables de faire du mal à des gens ou des animaux que nous aimons ;
- nous pouvons consommer des substances que nous savons dangereuses pour notre santé ;
- nous pouvons sciemment fermer les yeux sur nos actes polluants pour la nature ;
- nous savons très bien mentir ou jouer les hypocrites pour obtenir une faveur ou un avantage quelconque ;
- nous pouvons faire semblant de ne pas ressentir une émotion, et y croire ;
- nous pouvons être fermement convaincus, et essayer de convaincre d’autres personnes - par la force s’il le faut - qu’un être supérieur domine et juge l’humanité (sans en avoir la moindre preuve) ;
- nous pouvons inventer des machines et des techniques pour faire souffrir ou tuer des êtres vivants, même si ce sont nos frères/sœurs, nos femmes ou nos enfants ;
- nous pouvons acquérir des objets qui ne nous serviront jamais ;
- nous savons prendre par la force, la manipulation ou la menace ce que l’autre n’a pas envie de nous donner de bon cœur ;
- nous pouvons dévaster un système naturel complet, animal ou végétal, juste pour le plaisir de le consommer, alors que nous n’en avons pas un besoin vital ;
- nous nous amusons à modifier la structure génétique du vivant, dans l’espoir vain - quand, dans le meilleur des cas il y en a un - que cela n’aura aucune conséquence néfaste ;
- etc.
Nous pouvons être fascinés au point de chercher à aller à la rencontre d’autres planètes ou univers situés à des milliards de kilomètres, et pourtant nous sommes souvent incapables de faire juste un petit pas de quelques millimètres à l’intérieur de nous pour regarder comment nous fonctionnons vraiment. Comment s’articulent notre propre mental, nos propres émotions, notre propre univers ? Pourquoi, et surtout comment pouvons-nous nous laisser gruger par des pensées que nous savons fausses la plupart du temps, car non appuyées sur des faits réels mais seulement sur de la spéculation ? Comment pouvons-nous nous laisser berner "en toute bonne foi" ?
Vous êtes-vous déjà posé la question ?
Nous sommes des êtres d’habitudes, et c’est ça qui nous empêche de changer, surtout quand cela demande un effort. Nous avons pris des habitudes de pensée et de comportement, ceci depuis tout petit en pratiquant l’imitation parentale, sociale. Il est important d’être comme tout le monde, c’est-à-dire normal. Si vous ne pensez pas comme la majorité, ou faites des choses non habituelles vous êtes a-normal, du coup c’est dangereux.
Des modifications incessantes s’opèrent dans la nature, certaines rapides, d’autres beaucoup plus lentes. Il y a au sein de toutes choses ce mouvement de transformation : naissance, croissance, usure, mort. Nous, humains, dotés de capacités mentales et cognitives soit-disant supérieures au reste du règne vivant, nous trouvons le moyen de ne pas arriver à nous adapter à ces mêmes capacités. C’est peut-être à cause de ce que nous nommons l’ego, cette curieuse attitude de s’identifier à ce que nous pensons et faisons. Ce fameux ego qui, s’il n’est pas correctement équilibré, va - pour sa pseudo préservation - essayer de "détruire" l’autre. Très créatifs nous avons développé de nombreux outils pour effectuer cette tâche, comme la culpabilisation, le rejet, l’invention du Bien et du Mal, la coercition, le mensonge, la punition et la récompense, le mérite, le non-dit, la médisance, la prostitution affective, la promesse, la menace, etc.
C’est pour cette raison que je disais en préambule que nous ne savons encore que très peu nous servir de la partie affective liée à notre capacité mentale. Je gage qu’il nous faudra encore beaucoup de générations pour qu’il y ait suffisamment d’humains ayant acquis cette maîtrise, et ainsi renverser la tendance mondiale à l’autodestruction.
Espérons simplement que la Nature, la Terre aura la patience et la capacité d’attendre que ses enfants grandissent.
Christian Patouillard